Cello

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Le silence frémit, le monde entier s'est tu.
L'écoulement du temps, pourtant inexorable,
Semble soudain figé, un instant suspendu,
On pourrait croire alors l'éternité palpable.
Ne bouge plus que le musicien, lentement,
Frôlant du bout des doigts le bois de l'instrument,
Comme un homme amoureux caresserait la peau
Du corps nu d'une femme attendant son étreinte.
Ses traits sont concentrés, doucement ses yeux clos
Se penchent sur ce corps qui cède sans contrainte
A ces bras qui l'enlacent et doucement déposent
Sur un coeur palpitant sa fragile structure.
Au creux de la pénombre aucun élément n'ose
Troubler ce doux moment: chacun voudrait qu'il dure,
Que ces tendres instants côtoient l'éternité.
Soudain le musicien esquisse un mouvement,
Il brise l'immobile et saisit son archet,
L'approche de sa douce en un grand geste lent.
Sur les cordes tendues il dépose sa main,
Marque alors une pause au delà de l'humain,
Où l'univers entier semble s'être arrêté
Inexplicablement devant cet hyménée.
L'archet touche les cordes, entre dans une danse,
S'échappe de l'ébène un son grave et sacré:
Le silence est brisé, la musique commence.
Les notes entourent l'homme, il reste concentré,
Et semble alors plongé dans une longue transe.
Au coeur de sa musique il lui en faudra peu
Pour devenir le maître et des hommes et des dieux:
Il régit le cosmos le temps d'un aria,
La course des étoiles est le pouls de son coeur,
L'amour et la beauté la danse de ses bras
Qui chaque instant jouent avec un peu plus d'ardeur.

Combien de temps les cordes ont-elles ainsi vibré?
L'archet les a quittées, mais résonnent encore
Sur le fil silencieux qui s'est réinstallé
Leurs chants retentissant au delà de la mort.
L'homme quitte ses cordes, abandonne le corps
De l'instrument de bois qu'il avait enlacé.
L'univers se reprend, la magie n'est plus là,
L'homme est devenu Dieu le temps d'un aria.
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